QUELLE ECOLE AUJOURD'HUI POUR LE SENEGAL ET L'AFRIQUE DE DEMAIN, 50 ANS APRES LES INDEPENDANCES ?
Le Théatre national Daniel SORANO de Dakar
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Monsieur le Président du Sénat,
Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,
Monsieur le Président du Conseil Economique et social,
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames et messieurs les Ministres d'Etat,
Mesdames et messieurs les Ministres,
Excellences Mesdames et messieurs les Ambassadeurs,
Mesdames et messieurs les Sénateurs et Députés,
Messieurs les Recteurs, Honorables invités,
Chers Parents d'Elèves,
Chers Collègues,
Chers Lauréats,
Permettez moi Excellence, Monsieur le Président de la République, d'adresser mes premiers mots aux lauréats pour leur dire qu'ils ont le privilège d'être là, aux premières loges de la République, du fait de leur labeur qui témoigne que l'excellence est le fruit du sérieux, de la discipline et de l'effort soutenu.
Chers lauréats,
Aujourd'hui, vous êtes récompensés pour avoir compris assez tot que le génie ne passe du virtuel à l'effectif qu'au prix d'immenses sacrifices auxquels vous avez si généreusement consentis, en surmontant les innombrables épreuves qui ont dû certainement sillonner votre trajectoire. Ce faisant, vous avez compris à la suite de Karl Marx s'aderessant au citoyen Maurice La Châtre qu'« il n'y a pas de route royale pour la science et ceux là seulement ont la chance d'arriver à ses sommets lumineux qui ne craignent pas de se fatiguer à gravir ses sentiers escarpés».
En effet, la loi de l'excellence nous a souvent instruits que rien de grand ne se construit sans effort, sans persévérance, sans patience. «L'excellence, dit Aristote, n'est pas un accident, une occurence mais une transcendance quotidienne et permanente de soi».
En ce sens, chers lauréats, par votre travail que cette cérémonie magnifie si solenellement,vous avez honoré vos parents, vos professeurs et votre pays. Par votre engagement dans la voie de l'excellence, vous avez sans doute pris pour modèles d'illustres personnalités au nombre desquelles le Président de la République, lui-même, brillant universitaire dont le parcours et la vision sont des exemples de persévérance, d'endurance et de dépassement de soi. Parmi ces personnalités, le Parrain de ce prestigieux banquet, éminent homme politique qui fait partie des Sénégalais qui ont joué un rôle de tout premier plan dans la lutte pour l'indépendance du Sénégal, je veux nommer Valdiodio Ndiaye, né le 19 Mars 1923 et décédé le 05 Mai 1984 à Dakar.
Par ce choix, le Chef de l'Etat cherche, certainement, à ancrer dans vos jeunes mémoires l'exemplarité du patriotisme et du courage politique de ce brillant juriste, militant emblématique de la souveraineté de son pays et de l'unité Africaine.
Monsieur Valdiodio Ndiaye Parrain de la Cérémonie
Excellence, Monsieur le Président de la République,
En vous remerciant du choix porté sur ma personne,sans doute expression de votre attachement si particulier au principe d'équité, attachement qui s'est traduit par exemple dans la parité, je me propose de réfléchir sur cette question fondamentale « Qelle école aujourd'hui pour le Sénégal et l'Afrique de demain, 50 ans après les indépendances?»
Notre étude est une réflexion qui nous invite à penser notre devenir. Il s'agit de nous assurer de la solidité du système d'éducation chargé de former notre jeunesse et de manière beaucoup plus précise, du système scolaire.
Penser l'école aujourd'hui pour le Sénégal et l'Afrique de demain, 50 ans après les indépendances, c'est réfléchir sur le type de femme et d'homme que nous voulons former. Il s'agit de définir une Politique de l'Education
à l'echelle nationale et continentale articulée à une dimension prospective au sens où l'on entend Gaston Berger, c'est à dire qui concerne les actuels et les futurs citoyens Sénégalais et Africains.
En effet, tout projet d'éducation, toute Ecole, vise à former un certain type de femme ou d'homme, et l'Ecole est précisément, ce lieu de production et de reproduction du savoir, du savoir-faire et du savoir-être. Or, cette institution et ses valeurs sont le fruit de toute une histoire. L'architecture de notre Ecole est, d'une certaine manière, un héritage de la colonisation européénne. Cela ne veut point dire qu'il a fallu l'implantation de l'école pour éduquer nos enfants.Toutes les sociétés, même celles qui sont perçues comme « archaiques» éduquent, et cela depuis toujours.
A preuve, dans nos sociétés traditionnelles, l'initiation des jeunes gens comportait une certaine afficacité qui permettait une socialisation réussie et une maîtrise des connaissances nécessaires à leur insertion dans leur milieu et dans le monde. Cela prévenait les crises multiformes qui pouvaient survenir.
CEREMONIE DE L'INITIATION
La colonisation est venue, non sans violence, accélérer la désarticulation déjà en gestation de cette double harmonie entre l'homme et l'homme mais aussi entre l'homme et la nature, notamment par l'entreprise de l'Ecole qui, tout en fascinant, était redoutée. Je vous renvoie à la société Diallobé dans l'Aventure Ambiguë de Cheikh Hamidou Kane.
M. CHEIKH HAMIDOU KANE - ECRIVAIN
Cette Ecole implantée par le colonisateur avait pour fonction de former des supplétifs, des commis et des Cadres moyens en rapport avec la gestion et le maintien de la domination coloniale.
Faidherbe, Gouverneur du Sénégal en 1854, dans la définition de sa mission politique de conquête et de domination, avait élaboré aussi en même temps, un projet d'école. Ainsi, le but recherché était d'implanter des écoles pour diffuser la langue française, qui se révèle ici comme un instrument de facilitation de l'expansion de la domination coloniale, mais surtout de corrosion des âmes, prises en otage. Nul n'ignore en effet que la langue n'est pas seulement un moyen de communication: elle porte l'âme d'un peuple. Il est clair dès lors que l'objectif fixé était la dimination culturelle et politique. A cet égars. Rolland Barthes a eu raison de dire, à l'occasion de sa leçon inaugurale au Collège de France, que « toute langue est fasciste » c'est à dire qu'elle nous enferme dans une vision du monde spécifique et nous contraint à penser d'une autre manière.
L’école était sous le système colonial un instrument d’aliénation où l’enseignement a consisté à amener des écoliers à adhérer à des valeurs – posées comme universelles – issues du patrimoine français. Or, celles ci, sélectionnées et fonctionnant comme des normes, ont été élaborés sur la base de leur propre histoire. Il fallait amener les jeunes Africains à admirer les héros du colonisateur. Sous ce rapport, l’école est demeurée plus que jamais un outil de propagande de la cause et de la langue françaises. On peut dire, à juste raison, que c’était le moyen le plus certain dont la puissance coloniale pouvait disposer pour faire accepter sa domination, car, comme le dit Maurice GODELIER, « dans une relation de domination, la force la plus forte n’est jamais celle du dominant, mais le consentement du dominé à sa propre domination ».
Ainsi, pour comprendre notre parcours depuis 50 ans, il faut interroger cette origine de notre école qui explique en grande partie ses maux et ses impasses. Dans cette perspective, on comprend parfaitement qu’au lendemain des indépendances, les jeunes états africains aient cherché à réorienter leur politique éducative, ce qui ne pouvait se faire sans une réélle prise en compte des nouveaux enjeux.
La tâche devait donc consister à diagnostiquer les tares héritées de l’Ecole coloniale et à construire la nation en transcendant les différences culturelles, éthniques, confessionnelles et historiques. Il était nécessaire de donner à l’Ecole une perspective africaine. Ainsi, la nouvelle mission consistait à transmettre aux jeunes gens qui la fréquentaient des normes et des valeurs identiques et endogènes. En effet, le modèle colonial devenant désuet, le recours à nos traditions intellectuelles et morales repérables dans les différents groupes qui constituent notre pays devenait incontournable pour la deconstruction de l’idéologie coloniale.
La finalité d’une telle entreprise était la formation d’un citoyen éclairé, conscient de sa responsabilité dans le devenir de la nation.
Pour ce faire, l’identification à la patrie passait d’abord par la connaissance de son pays, ses héros, sa géographie, son économie, son histoire; en somme, il a fallu nous approprier notre identité en la réécrivant, nous approprier notre passé. C’est l’histoire de la chasse racontée par les lions et non plus par les chasseurs.
L’Ecole devait ainsi s’employer à cultiver l’amour de la patrie, à faire connaître les traditions et S’y enraciner tout en s’ouvrant au monde extérieur. C’est en ce sens que Senghor invitait à « s’enraciner dans notre propre culture irrgué par une tradition vivante et s’ouvrir à l’autre, à sa richesse que représente sa difference». En d’autres termes, une dialectique du Même et de l’Autre œuvre ici sous la modalité d’une ambition consistant à amener le jeune écolier à s’enraciner ans les valeurs authentiquement africaines mais en meme temps, à s’ouvrir aux valeurs universellement partagées. Cette dialectique entre l’Alter et l’Ego n’est elle pas magnifée par tous ces homes soucieux de la paix et de la concorde? Parmi ces esprits bien êlucides, nous ne pas penser à Antoine de Saint Exupéry que nous citons de mémoire « si tu diffères de moi, mon frère, loin de me léser, tu m’enrichis ». C’est la condition de notre affirmation, de la reconnaissance des autres mais aussi de la reconquête de l’initiative historique sans laquelle nous ne pouvons être compétitifs dans un context de concurrence.
Mais reconnaissons le, cette rupture necessairement radicale a été timide. C’est là, tout le paradoxe. Notre Ecole, malgré l’urgence et l’exigence radicale de rupture, n’est pas parvenue à romper le lien ombilical avec sa génitrice colonial. En clair, elle continue de trouver ses fondements paradigmatiques dans ce passé réprouvé non sans façonner aujourd’hui encore, une élite extravertie. On comprend pourquoi pendant les années 60, l’un des combats majeurs menés par les intellectuels noirs africains était d’éclairer les peuples, d’où le succés des mouvements de la Négritude, de la conscience noire panafricaine, fédéraliste ou indépendantiste.
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Penser l’Ecole après 50 ans d’indépendance c’est réfléchir par-delà les obédiences de quelque sorte qu’elles puissent être, pour trouver des solutions durables aux problèmes qui la gangrènent. L’Ecole, aujourd’hui, satisfait de moins en moins la plupart des acteurs: les parents, les enseignants, encore moins l’Etat qui lui consacre pourtant un budget colossal – qui s’élève à 40% - et qui se demande ce qu’il faut faire pour la sauver.
En réalité, nous assistons à une crise mondiale de l’éducation qui n’est que le reflet d’une crise plus générale de la société moderne qu’on ne peut résoudre que par une politique clairement définie, qui integrer une prise en charge de la dimension ethique du sujet à former et une restauration de l’autorité des ainés ( les parents, les professeurs…) qui, bien que n’ayant plus le monopole du Savoir, demeurent des piliers indispensables.
On le sait, l’école est prise dans le vertige des transformations qui secouent nos societés. Elle demeure pourtant la seule réponse aux questions qui nous assaillent et qui nous viennent du fait que nous sommes encore les parias de la modernité. Que l’Ecole coûte cher, nul ne le conteste, mais si nous voulons sortir de notre situation de pays dominé, nous n’avons pas d’autre alternative que celle qui consiste à donner une bonne education à nos enfants. Comme le dit le Juge Kéba Mbaye qui insiste sur la dimension fondamentale de l’éthique: « La deuxième condition du règne de l’éthique, c’est l’éducation. Tous mes amis des pays émergeants, pouirsuit il, me le disent; la clé de leur réussite, c’est l’Education »
Après 50 ans d’indépendance, l’Afrique est à la croisée des chemins. Guerres civiles, famines, catastrophes naturelles, coups d’états sont pourtant toujours notre lot quotidien. Certes des pays comme le Sénégal ont encore une croissance positive, ce qui dénote une réélle volonté de progrés. Mais le chemin à parcourir est encore long, et nous ne prendrons pas la mesure des enjeux tant que nous ne comprendrons pas que le Savoir est devenu l’infrastructure des sociétés modernes. C’est un contexte semblable qui a fait dire à Hegel que « l’importance d’une bonne école ne se fait jamais sentir plus fortement qu’au milieu des circonstances propres aux temps que nous vivons».
Nous pouvons, à bon droit, brandir un certain nombre d’indicateurs prouvant à souhait le gigantesque parcours accompli en 50 ans, plus que les 300 ans de colonisation ! Aujourd’hui, nous avons pu, par exemple, au Sénégal, démocratiser l’accés au Savoir en ayant presque atteint le taux de scolarisation universel (92,5%), et implanté des écoles dans les hameaux les plus reculés, des collèges de proximité, des lycées, des centres de formation professionnelle et des universités dans différentes régions du pays, introduit des «Daaras» modernes. Mais la grande innovation, Monsieur Le Président de la République a été le concept et la réalité de la Case des Tout-petits, qui prend les enfants en bas-âge en permettant ainsi de les socialiser très tôt et de restituer aux personnes âgèes la place qui, jadis, était la leur dans l’Education des enfants.
Ces efforts ont été fournis en même temps que d’autres, notamment le recrutement en nombre important d’enseignant, dans les différents secteurs de l’enseignement, la revue en hausse sensible du traitement des enseignants, la dotation en materiel didactique, la résorbsion de la fracture numérique par l’universalisation de l’accés à l’ordinateur et à l’internet ( par l’implantation des salles informatiques équipées dans les établissements scolaires),la promotion de la scolarisation des filles ( aujourd’hui, le taux de scolarisation des filles est passé sur la période 2003-2009 de 73% à 95,9% soit une evolution de 22,9%...
En dépit de ces réponses pour promouvoir l’Ecole de demain, force est de constater qu’il reste du chemin à parcourir à tous les nouveaux afin d’améliorer les performances. Il s’agit entre autres:
- De combattre le mimétisme culturel en donnant à nos enfants le sentiment d’être les dépositaires du testament de nos ancêtres et surtout les transmetteurs obligés de notre identité.
- De revaloriser les langues africaines précisément en les introduisant dés l’école maternelle puisque les pédagogues nous enseignent qu’il est plus aisé pour l’enfant de conceptualiser et de s’approprier le monde dans sa langue maternelle facilite les apprentissages et la comprehension des autres langues. La grande urgence, c’est de faire de nos langues des outils d’administration et de gestion. Et l’histoire a montré que nous, Africains, sommes polyglottes par nécessité, soit parceque l’on vit à côté d’autres groupes ou que l’école nous impose la langue officielle.
- D’assurer le développement professionnel des maîtres en les inscrivant dans un dispositive de formation pédagogique efficace et articulé autour de contenus répondant aux besoins et selon une méthodologie et une durée appropriées. C’est dans cette mesure seulement que l’on pourra endiguer la dégradation accélérée des niveaux et pretendre à des enseignements de qualité.
- De rationnaliser la carte scolaire par une gestion du personnel integrant la prise en compte de certaines norms de qualité et se méfiant des contraintes politiques locales qui obéissent souvent à des determinations étrangères plutôt qu’à un souci d’objectivité et de rationalité. C’est pourquoi, il est nécessaire d’opérer une programmation des constructions scolaires afin d’optimiser l’allocation des ressources en tenant compte du besoin du plus grand nombre..
- De pacifier l’espace scolaire: il est necessaire qu’il ait une synergie des efforts entre les différents partenaires ( Autorités, parents d’élèves, syndicat d’enseignants, et même élèves et étudiants). L’Ecole doit être préserve des conflits récurrents qui la paralysent, elle doit être un havre de paix, c’est le lieu du « loisir de penser». Prévenir les crises exige des différents protagonistes qu’ils aient en vue l’intérêt exclusive de l’Ecole et qu’ils soient de bonne foi.
Mais l’Ecole n’étant pas un microcosme isolé dans le macrocosme social, ses convulsions ne sont que le reflet de celles de la société. C’est en ce sens qu’en janvier 1981, les Etats Généraux de l’Education et de la Formation (E.G.E.F.) se sont tenus pour réfléchir sur l’Ecole traduisant ainsi une volonté de reformer cette institution fondamentale parcequ’elle répondait à peine aux attentes de la société.
Il importe aujourd’hui de revenir à l’esprit des Etats Généraux de 1981 pour trouver des éléments de réponse car ils apparaissent comme une analyse lucide de la situation qui prévalait à l’époque. Cette analyse était le fruit d’une réflexion consensuelle qui présentait des solutions particulièrement novatrice: integration des langues nationales, de l’enseignement religieux (introduit seulement dans notre système depuis 2008 et partiellement), creation de filières professionnelles…
L’Ecole Nouvelle préconisée par les Etats Généraux se voulait totalisante en tant qu’elle cherchait à prendre en compte tous les aspects de l’individu. En effet, ce qui importe dans une entreprise d’Education, c’est de comprendre la dimension complexe de l’être éhumain. On refuse ici de s’installer dans une perspective mono-analytique qui réduirait l’homme ou la femme à un seul aspect. Cela exige alors la prise en compte des différentes sphères à l’intérieur desquelles évolue cette femme ou cet homme qu’il est question de former. Cette analyse trouve son ancrage dans la tradition des philosophes comme Platon, Kant, Rousseau, Hegel qui se sont intéressés de très près aux problématiques sociales de leur époque et, partant, à l’éducation. Penser l’Ecole n’est pas une nécessité comprise comme volonté de réforme de la société comme lieu de transmission.
Excellence, Monsieur le Président de la République,
Aujourd’hui, les défis du XXIème siècle doivent nous amener à investir comme vous ne cessez de le rappeler, dans les ressources humaines perçue comme facteurs determinants de croissance. Le facteur humain influe directement sur la production, la créatvité et l’inventivité. Cette option pour l’Education et la Formation a permis à des pays comme le Japon, quoique dépourvus de ressources naturelles mais s’adossant fortement sur sur ses traditions, de se developer et de se poser comme une grande puissance.
Dans le même sillage, d’autres pays comme la Corée du Sud, la Malaisie, la Chine, Taïwan, Singapour ont très vite compris que le développement ne se réalise pas nécessairement par la possession de gisements de matières premières mais qu’il présuppose la valorisation des gisements humains. C’est alors que suivant l’exemple du Japon, ils vont investir massivement dans l’éducation et la formation. En effet, si le Japon de l’Ère Meiji a réussi deux grandes revolution, c’est que ses dirigeants, à ce moment précis de son evolution, ont mis l’accentsur le caractère determinant du facteur humain dans le développement économique et social. Le Savoir apparaît comme la première denrée économique et politique à l’ère de l’information.
Considérant ces expériences, il ressort que l’Education performante, c’est bien celle là qui prend son ancrage dans les réalités socio-culturelles de l’apprenant, ce quoi permet de venir à bout du mimétisme pour une mise à profit de la dialectique qui doit structure les rapports entre enracinement et ouverture. Sans doute c’est un tel esprit qui a incite notre collègue Alpha Amadou Sy à réaffirmer avec force : « aussi paradoxal que cela puisse paraitre, les jeunes se doivent de realizer que la problématique de la culture, dans la perspective du développement , garde, aujourd’hui encore, toute sa fraîcheur. L’Afrique qui se meut douloureusement dans la mondialité, ne saurait faire l’impasse ni sur les questions identitaires, ni sur les questions culturelles. Qu’il faille éviter les pièges des « identités meurtrières»du passéisme et/ou du culturalisme sous toutes ses forms ne saurait être un prétexte pour minorer le role determinant de la culture dans tout projet de société».
Cet ancrage culturel, en tant qu’il sert de structure d’accueil à la créativité et à l’inventivité reste une des conditions de possibilitéd’une appropriation positive de ce qui se fait ailleurs. Partant, les Africains pourront devenir contemporains des autres en faisants leurs les immenses acquis des sciences et des technologies en function des preoccupations vitales de leurs peuples.
A contrario, là où le vide culturel sévit, nos peuples sont à la merci des influences étrangères dans ce qu’elles ont de plus perverses pour le développement. Ainsi, nos rares enfants qui ont la chance d’échapper à la fracture numérique sont conditionnés par des moteurs de recherché qui vulgarisent des manières de faire ou d’être que le Nord érige, malencontreusement, en absolu. Ce conditionnement, qui imprègne leur environnement mental et culturel, entretien le mythe de l’Ailleurs. L’histoire, pour eux, se passé là-bas et la consequence de cette extraversion, c’est le mot d’ordre : partir à tout prix. D’où le double défi: éduquer nos enfants en respectant les norms universelles tout en les enculturant dans nos traditions.
En vérité, les deux defies précités ne sont pas les euls, il y a un autre yout aussi pregnant, c’est celui de la democratization de l’accés du Savoir pour une qualité de l’Education, pour une société plus equitable apte à former des gens compétitifs.
C’est pourquoi Excellence Monsieur le Président de la République, nous ne pourrons répondre présents à ce grand rendez-vous sans pour autant acquérir ces « armes miraculeuses» qui nous délivrent de l’état de consommateurs passifs du Savoir produit par d’autres et nous poser en producteurs de ce capital immateriel, aujourd’hui le plus fécond.
La democratization devrait s’accompagner d’une fédération de ressources humaines et autres au niveau du continent. La mise en pratique d’une vision continentale à travers les Etats – Unis d’Afrique obéit à cet impératif. Vous avez théorisé, Monsieur le Président de la République, dans votre ouvrage « un destin pour l’Afrique » un enseignement supérieur continental, adapté aux différentes regions africaines selon leurs besions et leurs ressources spécifiques. Vous avez commencé à mettre cela en pratique avec l’université du futur africain. Il ne suffit donc pas d’avoir des ressources naturelles, encore faudrait il disposer des homes capables de les mettre en valeur.
Ce que l’Ecole coloniale a réussi, dans son versant fédérateur, au niveau de l’AOF, nous pourrions bien le realiser ici et maintenant. Le succés d’une telle entreprise est tributaire d’un ancrage culturel et d’ine conscience panafricaniste des élites qui pourront, à leur tour, exercer un leadership efficace.
La politique, faut il le rappeler, organise la vie à l’intérieur de la cité en commençant d’abord par s’occuper comme dit Hannah Arendt, « des nouveaux venus » que sont les enfants pour les protéger du monde et protéger le monde de ces « étrangers».
Par conséquent, une bonne politique éducative devrait mettre l’accent sur l’insertion des jeunes dans la société qui les accueille. L’Ecole a pour mission de les préparer à assurer continuité et surtout de susciter des vocations, de faire émerger une élite. Amilcar Cabral disait à ce propos dans son ouvrage – L’arme de la théorie – que « pour diriger un peuple vers sa liberation, vers son développement, il faut une avant-garde, c’est à dire des gens qui montrent qu’ils sont les meilleurs et qu’ils sont capables de le prouver dans l’action».
Il revient alors à l’Ecole d’aider chaque jeune à se donner une vocation, se former et se percevoir comme future cadre africain. Ce qui implique la concertation entre pays africains au niveau des programmes et des methodes d’enseignement tout en veillant à préserver les spécificités nationales. La politique de formation des jeunes africains doit préparer et accompagner l’unité et la renaissance africaine qui en sont à la fois le moteur et le résultat: intégrer les différentes formations de l’école primaire jusqu’ à l’université.
Penser l’Ecole sénégalaise d’aujourd’hui et de demain, c’est esquisser les conditions culturelles, mentales, infrastructurelles et pédagogiques propices à une saine emulation pouvant favoriser l’émergeance de notre genie et l’éclosion de talents propres à porter cette dynamique. Et l’intéret de cette emulation, vous l’avez bien cerné, Monsieur le Président de la République, vous qui tenez à perpétuercette cérémonie solennellement organisée par la République pour honorer ses filles et ses filsles plus méritants.
Chers lauréats,
Le Chef de l’Etat, en president personnellement cette prestigieuse rencontre dans ce mythique Temple des Arts, ne cherche pas seulement à vous féliciter pour le travail accompli. Il vous exhorte à œuvrer advantage pour être à la hauteur des immenses et légitimes attentes d’un people qui se doit de triompher de l’ignorance et de la pauvreté.
Monsieur le Président de la République,
En vous remerciant vous et les plus hautes autorités de l’Etat et en particulier Monsieur le Ministre de l’Education, en saluant l’effort constamment fourni par les parents d’élèves et en m’honorant de la determination et de l’abnégation de tous les enseignants toujours au service de la grande cause de l’Ecole, je dis:
- Félicitations à nos jeunes lauréats
- Ma profonde gratitude à ceux qui m’ont offert l’opportunité de m’adresser à cette si auguste assemblée.
- Et merci à tous pour votre aimable attention.
Mme DIEYNABA BADJI
Professeur de philosophie au Lycée Galandou Diouf de Dakar